Réponse observation N°10-06

VOTRE REPONSE A BIEN ETE ENREGISTREE


- Pourquoi une nouvelle observation à Staphylococcus aureus ?

- S'il s'agit toujours une espèce bactérienne d'isolement fréquent en particulier en centre de soins comme le milieu hospitalier (2 ème espèce en fréquence lors d'infections nosocomiales), le plus souvent multirésistante aux antibiotiques (HA-MRSA pour Hospitalized-Acquired)(OBS 05). Un nouvel aspect des infections à staphylocoques a été observé au cours des dernières années relatif aux infections communautaires sévères liées à des souches de S.aureus plus virulentes (CA-MRSA pour Community Acquired)(OBS 31).

Pour en savoir plus

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- Cette observation met en lumière un aspect encore plus récent des infections humaines à SARM d'origine animale, principalement porcine, d'où une notion professionnelle.

- Ce type de souche SARM ou MRSA est aisément détectable (antibiotype ci-dessous) par une sensibilité inhabituelle aux aminosides (kanamycine, gentamicine, tobramycine), aux fluoroquinolones, à l'acide fusidique. En revanche, la résistance aux MLS, par exemple érythromycine, lincomycine (MLSB constitutive ou inductible) est insconstante (de l'ordre de 50% des souches) contrairement à celle aux tétracyclines (100% des souches),souvent prescrites en élevage porcin.

SARM: antibiotype selon le type (HA, CA, LA)

Antibiotiques

HA-SARM

CA-SARM
(clone ST80)
CA-SARM
(clone ST5/Géraldine)
LA-SARM
(ST398)
Oxacilline
R
R
R
R

Kanamycine

R
R
R
S

Gentamicine

R
S
S
S
Tobramycine
R
S
R
S
Ofloxacine (FQ)
R
S
S
S

Erythromycine

R
V
S
V
Ac.fusidique
V
I/R
I/R
S
Tétracylines
R
R
S
R
PVL- TSST-1-
PVL+
TSST-1 +
PVL- TSST-1


- Le biologiste peut donc différencier de telles souches et les adresser au CNR correspondant qui a les moyens moléculaires pour parvenir à un diagnostic précis:


- La recherche d'une souche de SARM est depuis peu facilitée par la culture sur le milieu supplémenté en céfoxitine : ChromID MRSA.

Pour en savoir plus


- Cette EVENTUELLE ZOONOSE a d'ailleurs fait l'objet d'un avis en mars 2009 de l'Autorité Européenne de Sécurité Sanitaire (EFSA) sur le danger du SARM/MRSA pour l'homme suscitant de nouvelles enquêtes de prévalence aussi bien en Europe que dans d'autres pays tels les Etats-Unis, le Canada, la Chine etc........ D'autres études plus récentes ont examiné ces souches au plan moléculaire, ainsi que les types d'infections observées chez l'homme. Les premières souches ont été identifiées comme NT, c'est-à-dire Non Typables par la technique d'électrophorèse en champ pulsé (PFGE) après digestion par l'enzyme de restriction SmaI. Il est apparu que le type ST398 est devenu prédominant en Europe chez l'animal dont le porc. Le récent congrès organisé à Londres en octobre 2009 conjointement par l'American Society of Microbiology (ASM) et l'European Society of Clinical Microbiology and Infectious Diseases (ESCMID) a apporté de nouvelles informations pour ces souches dénommées LA-SARM (LA pour Livestock-Associated) à cause du pouvoir pathogène chez l'homme.

- PREMIERE OBSERVATION : Dans les années 2002-2003, la Mutualité Sociale Agricole en France lança une enquête sur le portage sain (nez, gorge, selles) de certaines espèces bactériennes au sein de ses membres, à savoir 113 producteurs de porcs dits industriels comparativement à une population témoin (113 employés de banque ou d'assurances)(Aubry-Damon et al, 2004).Cette enquête de prévalence démontra, en particulier que le portage de S. aureus est beaucoup plus élevé chez les éleveurs de porc que dans la population témoin. Chez les éleveurs, 10 % des souches sont de type SARM alors qu'une majorité de souches (72%) est résistante aux macrolides. En revanche dans la population témoin, aucune souche n'est de type SARM et seulement de l'ordre de 7 % des souches exprime une résistance à l'égard des macrolides. Un deuxièmier fait, épidémiologiquement essentiel, porte sur la comparaison des souches d'origine humaine et celles d'origine animale par une technique d'analyse comparative de sept gènes ménages (MultiLocus Sequence Typing ou MLST)(Armand-Lefevre et al., 2005). Chez les 44 souches de S. aureus isolées des narines d'éleveurs porcins, 19 types de séquence ou ST ont été individualisés dont certains déjà connus chez l'homme tels ST5, ST15, ST34. En revanche ST398, retrouvé chez 6 éleveurs n'avait été à cette époque, rencontré qu'une fois, aux Pays-Bas. Enfin les quatre souches ST 398 d'origine porcine sont indistinguables des 6 souches d'origine humaine.


Emerging Infectious Diseases, 2004, 10: 873-


Emerging Infectious Diseases, 2005, 11:711


- QUELQUES CARACTERISTIQUES DES SOUCHES ST398 : Les premières souches de SARM ont été isolées aux Pays-Bas chez le porc dès février 2003. Ces souches ont été originellement dénommées NT. Aux Pays-Bas, la prévalence de NT-SARM, identifiée comme appartenant au nouveau complexe clonal ST398 est passée de 0% en 2002 à plus de 21 % en juillet 2006. Le portage humain d'un tel clone a été statistiquement corrélé entre le réservoir animal (porc, bovin) et la profession d'éleveurs et il était responsable de plus de 20% des infections rapportées chez l'homme aux Pays. En France, une enquête récente conduite entre janvier et septembre 2007 donne une prévalence plus faible de portage de SARM, de l'ordre de 13 % pour un total de 264 souches examinée chez le porc (Jouy E. communication personnelle). Le typage par MLST démontra à nouveau la prédominance de ST398 (81 %) par rapport à ST5, ST8 et ST1348 (de l'ordre de 6%).
. Une importante étude de prévalence du portage du SARM chez le porc a été conduite en Europe entre janvier et décembre 2008. Vingt-quatre pays membres ont participé à l'étude, rassemblant 4597 élevages de porcs reproducteurs, dont 1421 de sélection/multiplication (élevage) et 3176 de production (engraissement et abattage). La prévalence de SARM a été estimée sur la base des résultats provenant des 24 États membres participants, à 22,8%, la principale souche de SARM identifiée étant la lignée ST398 qui représentait 92,5% des isolats. Dans les exploitations de production, 16 États membres et un État non membre ont détecté le SARM, alors que 8 États membres ne l'ont pas détecté. La prévalence des exploitations positives pour le SARM et le SARM ST398 était plus élevée, respectivement de 26,9% et 25,5 et elle variait également considérablement au sein des États membres, de 0% à 51,2% et de 0% à 50,2%, respectivement (Figure ci-dessous)(Pour en savoir plus).

. Si le portage nasal chez le porc du ST398 est clairement démontré dans plusieurs pays européens ou encore au Canada, aux Etats-Unis et en Chine, des enquêtes ont été conduites chez d'autres réservoirs animaux comme les bovins, ovins, équins ou carnivores qui apparaissent d'une importance limitée.
. La présence des facteurs de virulence tels PVL, EFT, ou encore TSS-1 n'est le plus souvent pas démontrée.
. La co-résistance aux antibiotiques des souches SARM d'origine porcine ou humaine est variable, mais surtout rapportée vis-à-vis des seuls antibiotiques de la famille des tétracyclines, plus rarement ceux de la famille des macrolides. Enfin, l'ensemble des souches est le plus souvent sensible aux antibiotiques ou agents antibactériens suivants : acide fusidique, fosfomycine, linézolide, rifampicine, glycopeptides (daptomycine, téicoplanine, vancomycine) et enfin mupirocine.

- POUVOIR PATHOGENE DE ST398 CHEZ L'HOMME: Le portage nasal a été rapporté avec des fréquences très variables, surtout à titre professionnel c'est-à-dire chez les éleveurs de porc, les vétérinaires, voire les employés d'abattoir. Un élément important concerne, semble-t-il, la faible transmission ultérieure aux autres membres de la famille, peu en contact avec le porc. Ainsi lors d'une enquête effectuée dans plusieurs régions d'Allemagne entre septembre 2007 et janvier 2009, une importante fréquence de portage de SARM de 86% a été rapportée chez le personnel exposé alors que celle-ci n'était plus que de 4,3% pour les membres des familles (Cuny et al, 2009). Cette même étude rapporte une fréquence de portage nasal élevée de SARM chez les vétérinaires de 45%, alors que celle-ci n'était que de 9% parmi les membres de leurs familles. Dans un autre pays, la Belgique, la fréquence de portage de SARM chez le professionnel exposé est apparue importante, en 2007, de l'ordre de 38%, mais avec peu d'infections cutanées (0,8%)(Denis et al., 2009).
. Après colonisation, divers types d'infection invasives ou non sont maintenant bien identifiés chez l'enfant, l'homme adulte, la femme ou encore le vieillard dans plusieurs pays européens (Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Danemark, Italie, Pays-Bas). Il s'agissait majoritairement d'infections cutanéo-muqueuses et pulmonaires avec quelquefois des souches SASM. Néanmoins, d'autres types d'infections ont été rapportées telle une mastite chez une jeune femme hospitalisée en 2004, une endocardite chez une femme de 63 ans en 2006 ou encore une pneumonie sévère chez un nouveau-né de 1 mois.
. Comme pour les souches d'origine animale, la co-résistance des SARM aux autres antibiotiques est moindre que celle de souches appartenant aux clones humains. La résistance des souches SARM ST398 d'origine animale ou humaine est surtout rapportée vis-à-vis des tétracyclines (de l'ordre de 80 % des souches), aux macrolides et apparentés (de l'ordre de 40 % des souches), en revanche la résistance est faible vis-à-vis des fluoroquinolones comme la ciprofloxacine (3%), des aminosides comme la gentamicine (6%) ou la tobramycine (13%) et enfin la sensibilité est constante pour l'association triméthoprime-sulfaméthoxazole (co-trimoxazole), la rifampicine ou encore la mupirocine. Le traitement des infections invasives fait le souvent appel et avec succès aux glycopeptides (vancomycine, teicoplanine). En revanche, les souches SASM ST398 d'isolement humain sont le plus souvent sensibles (< 10% de souches résistantes) aux divers agents antistaphylococciques habituellement prescrits : aminosides, tétracyclines, macrolides et apparentés, fluoroquinolones ou co-trimoxazole.
. Un dernier élément intéressant à prendre en compte est à visée épidémiologique à cause de l'éventuelle présence du SARM ST398 en milieu hospitalier permettant d'évoquer le terme d'infections nosocomiales dans plusieurs hôpitaux allemands ou hollandais. Plus récemment en Allemagne, l'impact du réservoir animal (porc) a été jugé capital (70% d'élevages hébergeant ST398) avec en corollaire, l'éventuelle diffusion de souches, en particulier pour les hôpitaux régionaux.

CONCLUSIONS : Des souches de S. aureus, le plus souvent de type ST398 isolées chez l'homme sont d'origine animale (porc). Un petit nombre d'entre elles sont résistantes à la méticilline (SARM) et ont pu, dans un nombre de cas limités causer des infections humaines, le plus souvent cutanées. Lors de résistance à la méticilline, les souches sont surtout résistantes aux tétracyclines et plus rarement aux macrolides. La proximité des porcs et les contacts étroits avec eux, notamment dans le cadre professionnel, semble être un facteur majeur de colonisation de l'homme. Actuellement, la transmission interhumaine a été observée, mais elle apparaît faible et la prévalence des souches de ST398 chez l'homme diminue très vite dès que les contacts potentiels avec les porcs ne sont plus présents.
La transmission de S. aureus ST398 des porcs à l'homme a fait craindre la survenue d'une nouvelle zoonose dont l'ampleur et les conséquences pourraient être importantes notamment si les souches étaient multirésistantes aux antibiotiques ou encore pouvaient produire, par exemple la toxine de Penton Valentine (PVL+). Ces perspectives ont justifié une réponse coordonnée et la mise en place de réseaux de surveillance européens. Actuellement la situation apparaît toutefois comme relativement rassurante sans dissémination importante de ces souches dans la population générale. Il convient néanmoins de rester vigilants.


Quelques autres informations utiles:

- Séance thématique du 20 mai 2010 (Académie vétérinaire de France)

- Voir la vidéoconférence sur le site Bacterionet: : "Peut-on parler d'une nouvelle zoonose ?"



Nous remerciements s'adressent à RAYMOND RUIMY, Laboratoire de Bactériologie, Hôpital Bichat-Claude Bernard, Paris, qui nous a envoyé la photographie de l'antibiogramme de la souche de SARM ST398 d'origine humaine.



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